J'ai testé pour vous la parachuthérapie.

Devenir parachutiste en quelques sauts, c’est possible. Une méthode permet d’acquérir rapidement les bases de la chute libre et du maniement du parachute. Encadrée d’instructeurs compétents et bardée de dispositifs de sécurité, je m’initie au parachutisme.

 

Eleanor Roosevelt, première dame des Etats-Unis de 1933 à 1945, conseillait de faire chaque jour quelque chose qui fait peur. Je me laisse inspirer par cette idée et choisis ma peur du jour : me jeter dans le vide depuis un avion en vol.

 

Aujourd’hui, j’apprends à sauter en parachute. Je me suis inscrite à une formation qui comprend sept sauts. La particularité de ce cours est que l’élève parachutiste, sans aucune expérience, doit se débrouiller seul dès le premier saut.

 

Avant, j’imaginais la chute libre du parachutiste comme un saut d’abandon dans le vide, esthétique et romantique…

 

Se sécuriser

 

La réalité est plus technique. Je m’engage sur la piste d’envol la tête emplie de gestes spécifiques à enchaîner dans un ordre précis. Avant le décollage, les vérifications à faire sont nombreuses. Mon corps est recouvert de matériel de sécurité. Combinaison, casque, lunettes, altimètre, lourd sac à dos avec parachute principal, parachute de secours et son déclencheur de sécurité. N’oublions pas que le parachutisme a été inventé par les militaires.

 

L’avion à notre disposition est un Pilatus. Il peut transporter dix parachutistes. Dans le groupe, je suis la débutante qui effectue son premier saut. Tous sont extrêmement bienveillants avec moi. Est-ce parce que c’est le dernier jour de ma vie ? Je pense à mes enfants que je vais laisser orphelins. Est-il encore temps de faire demi-tour ?

 

Non, il faut embarquer. L’avion est arrivé, le moteur tourne, le carburant coûte. Chacun prend sa place dans l’avion selon un ordre défini au préalable. La débutante et ses deux instructeurs sautent en dernier.

 

S’envoler

 

Démarrage de l’avion sur une piste en herbe, secousses, prise de vitesse et enfin, le petit vertige de l’envol. C’est parti pour 15 minutes d’ascension. A l’intérieur, dix humains qui ne se connaissaient pas il y a dix minutes partagent une étonnante promiscuité. L’espace est si restreint que nous nous touchons tous, comme si nous formions un seul corps. Assis par terre ou sur des banquettes, ses mains contre mes genoux, dans mon dos, ses tibias, mon épaule contre la sienne, ses yeux dans les miens. Cocon d’humanité. Pour quelques minutes encore. Vais-je mourir ?

 

Altitude : quatre mille mètres. La porte métallique coulisse. Le bruit du moteur, l’odeur du kérosène, le froid du courant : c’est l’hostilité qui s’engouffre dans l’habitacle. Le largage doit commencer. Go ! Le premier se jette. Quinze secondes. Le deuxième, go ! Quinze secondes. Go ! Quinze secondes. Go ! Y a-t-il une issue ? Go ! Cette porte béante ressemble à un monstre qui avale des humains. Ils disparaissent les uns après les autres. Go ! C’est mon tour. Devant et derrière moi, les instructeurs qui accompagnent ma chute. Le pilote attend que nous sortions. Je fais entrer de force mon cerveau dans une cage rationnelle et me concentre sur la procédure de sortie. Je fais les bons gestes dans le bon ordre. Face au vent, je saute.

 

Chuter

 

La gifle ! En plein visage. Yeux, bouche, narines, oreilles ; l’air s’engouffre sans demander la permission. Il déborde de partout. Mon corps est une feuille morte tombée dans un torrent. Tout échappe à ma maîtrise. Pour prendre la bonne position et stabiliser ma chute, je dois me relaxer. Mon cerveau me dit que je suis en train de mourir mais mon corps doit se décontracter. Le temps passe et presse ; l’altimètre n’attend pas. Je DOIS me détendre.

 

Longue expiration, je ferme les yeux, je lâche prise. Le miracle se produit : je chute, stable, à 200 km/h. A cette vitesse, l’air est une masse sur laquelle il faut s’appuyer. Les deux instructeurs flottent à mes côtés, rassurants. Ils corrigent ma position au moyen d’un code gestuel. A 200km/h, on est sourd ; seul le langage des mains est possible.

 

Je chute, libre.

 

1500m : l’altimètre à mon poignet indique qu’il est temps d’ouvrir le parachute. Je fais les bons gestes dans le bon ordre. Mes instructeurs disparaissent. J’attends une éternité que la voile se déploie. Les lois de la physique sont implacables : passer de 200km/h à 15km/h en 3 secondes est brutal.

 

Planer

 

Tout s’est arrêté : l’air, le vacarme, la vitesse. Je suis seule au monde, suspendue entre le ciel et la terre. Je plane dans le silence. La chute n’a duré que 50 secondes mais l’intensité était telle que j’en tremble encore.  A partir de maintenant, j’ai 5 minutes pour descendre.

 

Soudain, la panique me prend. Où suis-je ? Je dois identifier le terrain d’atterrissage mais suis totalement perdue. Au-dessous de moi, des villages, des routes, des champs, des villages, des routes, des champs. Je sais que la ville au loin est Turin et je distingue les Alpes. Mais pas le terrain d’atterrissage. Je peux piloter mon parachute au moyen de poignées dans mes mains mais je ne sais pas où le diriger. Inéluctablement, je me rapproche du sol.

 

Se poser

 

Ça y est, le toit carrelé du hangar à avion est en vue ! Sortis de nulle part, les autres parachutistes au-dessous de moi sont maintenant visibles. Des êtres humains ! Je me sens ré-appartenir à la communauté des vivants. Je mobilise mon cerveau une dernière fois pour la phase d’approche et pour l’atterrissage. Viser le champ prévu à cet effet, arriver par un itinéraire en forme de U, face au vent. A hauteur d’arbre, commencer à freiner, en trois étapes, en tirant sur les poignées. Le dernier freinage est celui qui me permet de me poser sur le sol en délicatesse. Ou pas. Le sol arrive trop vite, je trébuche, je m’étale. Sans mal.

 

Vivre

 

Je suis à nouveau un être humain, vivant, le corps posé sur la planète terre. L’adrénaline me rend euphorique. Il me reste six sauts à effectuer.

 

J’ai testé pour vous la parachuthérapie : faire croire à son cerveau que l’on va mourir et finalement lui montrer que l’on s’en est sorti vivant. Excellente méthode pour relativiser ses petites peurs et soucis du quotidien.

 

Merci Madame Roosevelt !

De retour sur terre

À la buvette du SkyDreamCenter, 20 mai 2015
À la buvette du SkyDreamCenter, 20 mai 2015

J'ai vécu cette expérience en mai 2015 au SkyDreamCenter proche de Piscina dans la province de Turin, avec l'Ecole de parachutisme de Château-d'Oex.

 

 

Devenir parachutiste

Comment ?

 

Première étape

Cours PAC (progression accompagnée en chute) : l’élève acquière en sept sauts une maîtrise du parachutisme qui lui permet de sauter seul. A l'issue du stage PAC, l'élève est autorisé à sauter seul en toute sécurité.

 

Deuxième étape

L’élève travaille individuellement sa technique de manière à réussir l’examen pratique et théorique de Swiss Skydive en vue de l’obtention de la licence de parachutiste.

 

Où (proche de Fribourg) ?

 

Ecole de parachutisme de Château-d'Oex EPCO 

Page Facebook de l'EPCO

L’EPCO organise des stages PAC à l’aérodrome de la Gruyère (Epagny), en Italie (Turin) et en Californie (Perris).

 

Quand ?

 

Le parachutisme se pratique par beau temps uniquement. En Suisse, d’avril à octobre.

 

Vivre une expérience de la chute libre d’une autre manière :