· 

Nom de gamine

“Oh tu te maries ! C’est merveilleux. Tu vas garder ton nom de jeune fille ?”

 

“Nom de jeune fille. » C’est mignon. La jeune fille, c’est la fi-fille de son papounet-net dont elle garde le nom-nom.

 

Si je garde mon nom, je ne suis pas une femme ; je reste une jeune fille. L’étape d’après, c’est la vieille-fille. 

 

Petite chose fragile

Car il est évident qu’une femme ne peut être femme sans un homme. Une femme sans contrat de mariage reste une “jeune fille”, comme en témoigne le nom de son nom. Une femme est une petite chose fragile qui n’est rien sans le mâle à ses côtés.

 

Par contre, un garçon qui se marie, garde son nom de petit-garçon-à-sa-maman mais devient « chef de famille ». (J’admets que cette notion de chef est un peu éculée, mais je ne suis pas sûre qu’elle le soit vraiment dans l’esprit de tous.)

 

D’ailleurs, je plaide pour renommer l’expression « nom de jeune fille » en « nom de gamine », histoire que ce soit clairement rédhibitoire pour les femmes qui hésiteraient à se marier, pire, qui se marieraient sans changer de nom.

 

Je pense que que tant que les femmes prendront le nom de leur mari, l’avis qui veut que la femme est une petite chose fragile, reste latent. À mon avis, on ne peut pas renier son identité, son origine, aller jusqu’à changer de nom et prétendre être une femme indépendante.

 

Arguments

Je connais les arguments en faveur du changement de nom : 

  • le mien est moche, celui de mon mari est plus élégant ;
  • le nom de mon mari s’accorde si bien avec mon prénom (et avec mon sac à main) ;
  • je veux le même nom que mes enfants et que mon mari, car je souhaite que nous soyons une famille ;
  • c’est pour faire plaisir à arrière-grand-maman et lui éviter une crise cardiaque.

Devenir une famille

À mes yeux, ce sont des arguments sans fondements. On ne devient pas une famille avec un nom écrit sur un formulaire. On ne devient pas mère avec des consonnes et des voyelles. On n’acquiert pas l’élégance en changeant de nom. On ne prouve pas un amour par le nom que l’on porte (d'ailleurs l'amour ne se prouve pas). Et si ça se trouve, arrière-grand-maman est beaucoup plus ouverte d’esprit qu’on ne le croit. 

 

La peur comme moteur

Je me demande si la raison profonde qui pousse les femmes à changer de nom et leur homme à les y inciter n’est pas la peur. 

 

Rassurer l'homme, sur le fait que sa femme lui appartient et n’ira pas voir ailleurs. “Je te donne mon nom, comme si j’inscrivais sur toi la marque que tu es mienne.”

Se rassurer soi-même ensuite. “Je fais comme les autres qui m’ont précédées et qui m’entourent. J’évite leur désapprobation et donc le rejet.”

 

L’élégance d’assumer

Je comprends ces raisons profondes. Je trouverais élégant que si la vraie raison pour perdre son nom de gamine était la peur, elle soit assumée. 

 

“Oui, je change de nom pour que mon futur époux se rende compte à quel point je l’aime et qu’il me fasse confiance.” “Je perds mon nom de famille car je n’ai pas le courage de dire à ma mère que je ne fais pas comme elle.” “Je bannis mon nom de gamine parce que si je ne le fais pas, j’ai peur que mon futur mari refuse de m’épouser.” 

 

“En effet, je veux que ma femme s’appelle comme moi, sinon je ne suis pas sûr qu’elle m’aime.” “Je veux que ma femme change de nom afin que les autres mâles sachent qu’elle porte la marque de ma lignée.”

 

Une autre manière d’assumer, serait de dire “Je prends le nom de mon mari car je suis complètement dépendante de lui.” Quoi que tu en penses, toi qui me lis, je trouve cette dernière attitude digne et élégante, car assumée.

 

Romantisme

Il reste un argument en faveur de la perte du nom de gamine. C’est si romantique, d’épouser un homme, de prendre son origine, son nom et d’aller habiter dans son village (comme ça se faisait à l’époque). C’est si romantique de se donner entièrement.

 

Malheureusement, l’empêcheuse de tourner en rond que je suis ne trouve pas ça romantique du tout. Je trouve que le romantisme réside dans le fait d'assumer des choix courageux vis à vis de la relation. Ce qui est, à mon sens, beau et noble dans un couple est la prise de risque.

 

Espoir

Pour ma part, je souhaite que les femmes et les hommes se sentent suffisamment en confiance pour s’unir sans avoir besoin d’artifices administratifs. Le nombre de divorces élevés, même quand la femme a perdu son nom de gamine, est peut-être un indice que ce n’est pas le nom qui garantit une union heureuse à long terme. 

 

Enfin, je suis d’avis que c’est par tirage au sort que l’on devrait désigner le nom de famille que portera l’enfant d’une union à deux noms.

Écrire commentaire

Commentaires: 0